Retraite : nom féminin , dont le Littré ne recense pas moins de vingt nuances de sens , allant de l' "action de se retirer", en passant par les notions de défaite ou de refuge, jusquà l'idée d'un "clou oublié dans le sabot d'un cheval". Là encore , il ne s'agit que d'une question de point de vue , amusons -nous avec les anagrammes pour découvrir ce que les mots nous taisent  ...

*La retraite peut être vécue comme un moment de passage : on est toujours dans l'action, on se retire avec le sentiment du devoir accompli, on laisse la place aux plus jeunes, aux plus valeureux, on reste en appui en arrière ... comme sur le champ de bataille ! 

 Retraite/Réattéri (bien dans ses baskets, ici et maintenant)

*Pour certains , elle sera vécue comme une défaite : on bat en retraite, c'est le naufrage de l'âge, la débâcle, le corps qui lâche , la mort sociale , la fin de l'égo et de la croyance en sa propre utilité... 

Retraite/Artérite (ça bouchonne dans les artères, y'a plus rien qui circule )

* Ou carrément, ressentie comme un assèchement de la vie , un espace de peur et de frustration : à l'image de l'argile , qui se rétracte en séchant ; une blessure qui ne guérit pas, comme ce clou planté dans le sabot d'un cheval... 

Retraite/Réattiré ou Tarterie (humeur Laura Ingalls, "je m'fous de tout, j' fais des tartes aux pommes")

* Pour d'autres, elle sera un refuge, un chemin vers soi, vers la spiritualité  : une quête d'apaisement , loin des bruits du monde , un idéal de liberté, une sorte de zone franche de la vie . .. 

Retraite/Réitérât (voyage en terre inconnue)

Ainsi, la retraite peut elle prendre différents visages selon l'angle par lequel vous l'abordez !

 @illustration d'après un photogramme du film, Les Barbouzes.

Pourquoi les Rosie sont-elles devenues les figures de proue des cortèges de manifestants contre ce projet de réforme des retraites ?

Petit rappel : Rosie  la riveteuse ? Icône de la culture pop américaine, symbole féministe de la place des femmes dans l'économie de guerre, n'a pas toujours été associée au "girl power" , tel qu'on peut se la représenter aujourd'hui. Sujet d'une affiche de propagande libérale à l'origine, imitée des pin'up de la culture pop , elle a subi de multiples réinterprétations : de l'affiche de Miller, en passant par la chanson "Rosie the riveter", à la réinterprétation de Norman Rockwell, son geste de retrousser les manches n'est pas sans rappeler la démonstration de force de Popeye le Marin ou même de figurer un bras d'honneur ... Si aujourd'hui , les femmes qui descendent dans la rue pour défendre leurs droits arborent volontiers le Bleu de chauffe , les gants en caoutchouc jaunes et le foulard rouge à pois blancs, c'est avant tout pour rendre visible  leurs luttes , pour montrer qu'elles sont là, DEBOUT, bien décidées à montrer leur force  .        @illustration : affiche d'Howard Miller, 1942.

Quelques dates et quelques chiffres pour comprendre ( ref.M.Larrère° , INSEE, gouv.) : 

* 1791, Olympe de Gouges rédige la Déclaration de la femme et de la Citoyenne 

*2023 :

- les salaires des femmes sont inférieurs de 20% en moyenne à ceux des hommes. 

- les temps partiels concernent 28% des femmes salariées.

- certaines sont encore rémunérées à la tâche (ex: femmes de chambre payées à la chambre et non à la journée)

- les femmes seules sont particulièrement menacées par la précarité : 42% des familles monoparentales sont dans la pauvreté , voire la très grande pauvreté pour 15% d'entre elles.

- les carrières hâchées : les femmes perçoivent en moyenne  25% de moins que les hommes - 39% d'écart si on ne tient compte que  des pensions de droit direct.

* rappelons que les femmes n'ont plus à demander l'autorisation à leur mari pour exercer une profession que depuis 1965. Et que l'égalité de traitement pour des travaux de valeur égale est posée dans la loi  seulement depuis 1972.

- les corvées domestiques : temps de travail gratuit dont la répartition ne progresse pas - 80% des femmes  y consacrent au moins une heure par jour contre 36% des hommes. 

* rappelons qu'en 1913 une campagne de la CGT promeut le repos le samedi pour les femmes au motif qu'elles ont du ménage à faire à la maison.

- le harcèlement au travail /à la maison : les victimes sont majoritairement des femmes.

*rappelons que le viol n'est défini légalement que depuis 1980 et que la première campagne de lutte contre les violences conjugales date de 1989., la loi qui en découle seulement 2010; #Metoo 2017.

- les accidents du travail et les maladies professionnelles  diminuent chez les hommes mais augmentent chez les femmes  ...

- et toutes celles, agricultrices, épouses de commerçants, d'artisans qui ont travaillé sans jamais être reconnues, qu'on qualifiait encore il y a peu de "sans profession". 

*les lois pour améliorer leur statut datent de 1980 et 1982.

Bref! Ce ne sont pas des revendications d'un autre âge ! Non, les femmes n'ont pas commencé à travailler quand les hommes étaient au front  ... 

Et si le gouvernement actuel utilise volontiers un langage martial pour qualifier la situation du pays, il ne faudra pas oublier que ce sont les caissières, les auxiliaires de vie, les infirmières, les femmes de chambre , etc.  qui étaient dernièrement en première ligne  ... 

Les Rosie nous le rappellent !