Dans un entretien avec le journal suisse
Le Temps, Edgar Morin , parlant de son ouvrage intitulé
Réveillons nous ! , explique à son interlocuteur que notre temps a plus que jamais besoin de poésie : l'être humain ne sera pas augmenté par le transhumanisme , seule la poésie peut amener sa métamorphose en Humanité ...
Alors que cette semaine de rentrée aura été marquée par une nouvelle vague de chaleur et qu'un rapport onusien tire à nouveau la sonnette d'alarme sur le réchauffement climatique, que des incendies puis des inondations ravagent la planète, que la Terre tremble au Maroc faisant plus d'un millier de morts, que la guerre sévit un peu partout dans le monde, que la France plonge encore dans ses obscurs démons avec les débats sur le port de l'abaya , une petite fenêtre d'optimisme s'entrouvre : Une femme, Une Québécoise, francophone,
Hélène Dorion, voit -
de son vivant - une de ses oeuvres de poésie entrer au programme du baccalauréat ... Mes Forêts ,
dont la première édition date seulement de 2021 , fait encore figure d'ovni dans le paysage scolaire mais est d'ores et déjà considérée comme "un de ces repères dont la littérature a besoin pour continuer à déployer son tracé d'humanité".
La concordance des faits, les liens qu'on peut établir , relèvent une fois encore d'une sagesse toute Taoïste et poétique : Aragon, chanté par Ferrat, ne l'avait-il pas pressenti ? " La femme est l'avenir de l'homme".
L'être humain augmenté, tel que le rêve une partie de l'humanité, ne répond qu'à des fantasmes économiques et technologiques, qui ne renouvèlent en rien ce qui fait notre Humanité mais prolongent artificiellement des conduites mortifères ; alors que ce qui sauvera l'humanité - selon le vénérable Monsieur Morin - ce sera sa capacité à faire
univers (étymologiquement, "tourné d'un seul élan vers"), à accéder à cette part de féminin, qui le rapproche de la Nature, de la forêt, du sauvage ...
Tournons-nous alors un instant sur l'étymologie du mot "sauvage" : l'adjectif provient du latin silvaticus* , qui signifie " de la forêt ( = silva*), forestier" . Au XVIIIème siècle, les philosophes des Lumières ont théorisé le mythe du Bon Sauvage ... Si nous sommes aujourd'hui sortis des forêts , devenus des gens policés (polis* = cité, ville) , nos forêts intérieures sont tout autant peuplées d'elfes magiques et de bonnes muses que de sombres pulsions animales . Sans doute nous faudra t-il, pour espérer faire un jour Humanité accepter l'idée qu'il nous faut (re)trouver cette part de nous mêmes restée dans les bois ... Et pour cela, quoi de mieux que la poésie ? Et le recueil
Mes Forêts
d'Hélène Dorion ?
J'aime tout particulièrement l'idée que les lycéens vont pouvoir se prendre par la main et se perdre dans ses forêts de mots , sans la canopée de siècles de commentaires, avec bienveillance et humilité, fouler au pied le terreau de leur humanité ...
Gageons qu'ils auront l'année pour se familiariser avec ses paysages, extérieurs et intérieurs, et que l'accueil sera plus policé que celui qu'a reçu en juin 2022, Sylvie Germain (cf. notre article du 1er Juillet 2022 -
La minute philo du week-end : l'arbre de vie, Sylvie Germain et le monde d'après )